Méditation fête de Pentecôte B – 23 mai 2021
La Langue des Signes
Un bruit venu du ciel…un violent coup de vent… des langues de feu… Qui va là ?!
Les têtes pointent en l’air comme au feu d’artifice,
sauf qu’on est en plein jour et que les pèlerins, dont pas un ne comprend l’autre, se découvrent surpris de réagir comme un seul homme qui aurait un seul cœur !
Le Souffle de Dieu vient de faire son entrée fracassante dans la vie des apôtres, de l’Église et du monde !
Ça n’était plus arrivé depuis la création du monde.
Une venue pourtant annoncée : Vous recevrez une force, celle de l’Esprit Saint… qui fera de vous mes témoins »
Cette sensation d’être remis à jour est bouleversante !
Comment dire l’Esprit, sans pouvoir le saisir ?
Un violent coup de vent !
Les verrous sautent, les portes claquent…les confinés se retrouvent à l’air libre ! Effondrement des certitudes…Ça sent le neuf !
L’Esprit ? Un véritable passe-muraille ! Un faiseur de brèches !
Il ne glace pas ; il chauffe le cœur : c’est tout brûlant en nous…
Un bruit …venu du ciel !
Un sursaut ! Une impatience à se lever, à témoigner, à prononcer dans la cacophonie du monde une parole de lumière permettant à chacun d’éprouver la vérité de ce qu’il vit dans l’harmonie retrouvée d’un vrai dialogue.
Une flamme !
Plus la peine de faire un détour pour aller constater une flamme embrasant un buisson…Elles sont là, au-dessus de nos têtes, et, ardentes, ces flammes de feu qui font de nous des Chérubins tout enflammés de la Parole et zélés à faire le bien !
Le Pyromane ? C’est le Ressuscité ! Venu jeter un feu sur la terre…
Cette petite boule de feu qu’est l’Église naissante va effrayer le monde…
Les dirigeants n’aiment pas ce genre d’Église : libre, animée par l’Esprit, insaisissable. Ils préfèrent une Église bien localisée, qui ne cause pas de remous ; une Église dévote, et, si possible, consacrée au salut des «âmes».
Les dirigeants religieux et les gardiens du temple au temps de Jésus n’ont pas pu réussir à le domestiquer, c’est pourquoi ils l’ont condamné et crucifié. Dossier clôturé. Affaire classée !
À peine trois jours plus tard, l’élastique a sauté ! La pierre a roulé ! L’oiseau s’est envolé !
Le dossier s’est révélé vide de toute accusation : Jésus que vous avez cloué à la croix comme un malfaiteur et un blasphémateur, Dieu l’a ressuscité, il est maintenant à sa droite et… et, je vous déconseille fortement d’aller en Appel, car c’est l’Esprit de Dieu qui est son Avocat… !
N’embêtez pas non plus ses disciples : ils ont le même Avocat !
C’est, en effet, le même Avocat qui accompagne les chrétiens sur les routes du monde et les encourage à porter la Joyeuse Nouvelle de l’amour du Père révélé par le Crucifié-Ressuscité à toutes les nations sans distinction de race, de religion, tous : les enfants bien-aimés d’un même Père.
S’ils vivent bien leur foi, les chrétiens n’auront jamais une pierre où reposer la tête. On pourra les assigner à résidence, ils resteront d’infatigables pèlerins sur cette terre. Et, personne ne pourra les contraindre à fuir les réalités de la vie qu’ils ont en charge de transfigurer dans la lumière de l’évangile.
En revoyant à la télé la vie de Sœur Emmanuelle, j’étais frappé par la force antigravitationnelle – spécialité de l’Esprit Saint – qu’il a fallu pour faire sortir la Sœur de sa Communauté religieuse en toute obéissance et répondre ainsi à un appel pourtant bien évangélique d’aller à la rencontre des pauvres. Cet appel personnel de la Sœur questionnant à son tour les membres de sa communauté, les invitant à se repositionner plus nettement par rapport à ce que veut dire concrètement : suivre le Christ sur son chemin de pauvreté. C’est ça qu’on appelle : la radieuse-activité !
C’est un classique dans l’histoire de l’Église : Sa résistance à l’Esprit Saint anesthésie en elle le dynamisme de la mission et la rend ipso facto insipide, lui valant en retour la parole la plus dure prononcée par Jésus : Si le sel perd sa saveur, il n’est plus bon à rien, on le jette dehors et les gens le piétinent.
Au concile Vatican II, l’Esprit a dû faire des heures supplémentaires !
Ça partait déjà mal, quand les plus sectaires prétendaient imposer aux évêques le latin comme langue au concile.
Toute affaire cessante, l’Esprit a fondu sur un cardinal pour lui faire dire : La langue universelle dans l’Église, c’est la Charité !
La langue de l’Église, ce ne sont pas des mots, ce sont des signes.
Ce sont les Signes que Paul énumère dans la lettre aux Galates : le fruit de l’Esprit c’est l’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la fidélité, la douceur, la maîtrise de soi…
Telle est la langue de l’Esprit Saint : les « Actes » de l’Amour.
Abbé Michel Diricq